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Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1.djvu/184

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LVIII
Excepté cependant le tien, ô poésie,
Qui parles toujours haut dans une âme choisie !
— Poésie, ô bel ange à l’auréole d’or,
Qui, passant d’un soleil ou d’un monde dans l’autre
Sans crainte de salir tes pieds blancs sur le nôtre,
Dans notre nuit suspends un moment ton essor,
Nous dis des mots tout bas, et du bout de ton aile
Sèches nos pleurs amers ; — et toi, sa sœur jumelle,
Peinture, la rivale et l’égale de Dieu,
Déception sublime, admirable imposture,
Qui redonnes la vie et doubles la nature,
Je ne vous ai pas dit adieu !


LIX
— Revenons au sujet. — Le jeune enthousiaste
Était beau cavalier, et certe une plus chaste
Que Véronique eût pu s’enamourer de lui.
Avant d’aller plus loin, il serait bon peut-être
D’esquisser son portrait. — Le dehors fait connaître
Le dedans. — Un soleil étranger avait lui
Sur sa tête et doré d’une couche de hâle
Sa peau d’italien naturellement pâle.
Ses cheveux, sous ses doigts, en désordre jetés,
Tombaient autour d’un front que Gall avec extase
Aurait palpé six mois, et qu’il eût pris pour base
D’une douzaine de traités.