Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 1.djvu/318

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée


Ainsi que sous l’oiseau qui s’y perche, une branche
Sous vos pieds qu’elle fuit, la tour frissonne et penche,
Le ciel ivre chancelle et valse autour de vous ;
L’abîme ouvre sa gueule, et l’esprit du vertige,
Vous fouettant de son aile en ricanant voltige
Et fait au front des tours trembler les garde-fous,

Les combles anguleux, avec leurs girouettes,
Découpent, en passant, d’étranges silhouettes
    Au fond de votre œil ébloui,
Et dans le gouffre immense où le corbeau tournoie,
Bête apocalyptique, en se tordant aboie,
    Paris éclatant, inouï !

Oh ! le cœur vous en bat, dominer de ce faîte,
Soi, chétif et petit, une ville ainsi faite ;
Pouvoir, d’un seul regard, embrasser ce grand tout,
Debout, là-haut, plus près du ciel que de la terre,
Comme l’aigle planant, voir au sein du cratère,
Loin, bien loin, la fumée et la lave qui bout !

De la rampe, où le vent, par les trèfles arabes,
En se jouant, redit les dernières syllabes
    De l’hosanna du séraphin ;
Voir s’agiter là-bas, parmi les brumes vagues,
Cette mer de maisons dont les toits sont les vagues ;
    L’entendre murmurer sans fin ;

Que c’est grand ! que c’est beau ! les frêles cheminées,
De leurs turbans fumeux en tout temps couronnées,
Sur le ciel de safran tracent leurs profils noirs,
Et la lumière oblique, aux arêtes hardies,
Jetant de tous côtés de riches incendies
Dans la moire du fleuve enchâsse cent miroirs.