Page:Œuvres de Théophile Gautier - Poésies, Volume 2, Lemerre, 1890.djvu/44

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Quoi ! tu n’as pas brisé tes fioles d’alchimiste,
Et tu penches toujours ton grand front chauve et triste
        Sur quelque manuscrit !
Dans ton livre, aux lueurs de ce soleil mystique,
Quoi ! tu cherches encor le mot cabalistique
        Qui fait venir l’Esprit.

Eh bien ! Scientia, ta maîtresse adorée
A tes chastes désirs s’est-elle enfin livrée ?
        Ou, comme au premier jour,
N’en es-tu qu’à baiser sa robe ou sa pantoufle,
Ta poitrine asthmatique a-t-elle encor du souffle
        Pour un soupir d’amour ?

Quel sable, quel corail a ramené ta sonde ?
As-tu touché le fond des sagesses du monde ?
        En puisant à ton puits,
Nous as-tu dans ton seau fait monter toute nue
La blanche Vérité jusqu’ici méconnue ?
        Arbre, où sont donc tes fruits ?

FAUST.

J’ai plongé dans la mer sous le dôme des ondes ;
Les grands poissons jetaient leurs ondes vagabondes
        Jusques au fond des eaux ;
Léviathan fouettait l’abîme de sa queue,
Les Syrènes peignaient leur chevelure bleue
        Sur les bancs de coraux.

La seiche horrible à voir, le polype difforme,
Tendaient leurs mille bras, le caïman énorme
        Roulait ses gros yeux verts ;
Mais je suis remonté, car je manquais d’haleine ;
C’est un manteau bien lourd pour une épaule humaine
        Que le manteau des mers !