Page:Œuvres de Vauvenargues (1857).djvu/386

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

332 ESSAI modération et légalité de son caractère le rendaient cons- tantdans ses résolutions. Il changeait sans peine d’applica- tion et de travail; il paraissait né pour remplir avec dis- tinction les emplois subalternes, qui renferment beaucoup de minuties; il n'imaginait point, n'inventait point; il allait aux routes battues, et se laissait porter sans résis- tance au cours capricieux des événements; mais ilsuivait avec célérité le til des 'choses, et exécutait avec prudence tout ce qui ne demandait qu’un sens droit et une habitude ordinaire des alfaires. Sa pénétration et son goût, joints au bonheur de sa mémoire, se portaient avec une indiiférente facilité sur toutes choses; mais il n’avait point cette véri- table étendue de génie qui, saisissant les objets avec leurs rapports, les embrasse tout entiers et réunis, et c’est ainsi · · qu'il avait des connaissances presque universelles, sans qu’on pût dire qu’il eût l’esprit vaste, contrariété assez or- dinaire. Mais il rachetait "ces défauts par les qualités qui donnent le succès; il était enjoué, plaisant, laborieux; d' une conversation légère et agréable, d'une répartie vive, quoi- qu'il parlât sans feu et sans énergie; enfin, à cette sagesse spécieuse qui plait aux esprits modérés, il joignait cœ agréments variés qui usurpent si souvent la place des ta- lents solides, et leur enlèvent la faveur du monde et les récompenses des princes.] i 37, — rntorurrs, ou r.'Esprit profond. Théophile a été touché, des sa jeunesse, de cette grande et louable curiosité de connaitre le genre humain et le dif- férent caractère des nations'; mais, en remplissant cet objet, il n'a pas négligé les hommes avec qui il devait passer la plus grande partie de sa vie, car il ne ressemble pointà ceux qui entreprennent de longs voyages, pour voir, disent·ils, d'autres mœurs, et qui n'ont jamais démélé celles de leur propre pays. Pousse par ce puissant instinct, et t C'est·le castle rappeler que Vauvenargues avalt un grand gout pour les voyages (voir les Lettre: à Saint- Vincent, enu·'autr¤ la V). — G.