Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/394

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de sa naissance, si bien que cinq ou six des plus braves de ces catérans highlanders auraient fui à la voix d’Allan, ou au son du cor qu’il portait. Dans le même temps, cependant, ils reprirent leur ancienne habitude, et firent aux Mac-Aulay, à leurs alliés et à leurs parents, tout le mal qu’ils purent. Cela provoqua une autre expédition contre la tribu, à laquelle je pris part. Nous les surprîmes en nous emparant à la fois des passages supérieurs et inférieurs du pays, comme c’est d’usage en pareil cas. Nous mîmes tout à feu et à sang devant nous. Dans cette terrible guerre, les femmes elles-mêmes, et ceux qui ne pouvaient porter les armes, n’échappaient pas toujours à la mort. Une petite fille seule, qui sourit à Allan au moment qu’il tenait le dirk levé sur elle, désarma sa vengeance. D’après mes pressantes sollicitations, elle fut amenée au château, et élevée sous le nom d’Annette Lyle, et c’est la plus jolie fée qui ait jamais dansé sur la bruyère au clair de la lune.

Il se passa un long temps avant qu’Allan pût souffrir la présence de cette enfant. Enfin il s’imagina, peut-être d’après ses traits, qu’elle n’était pas du sang odieux de ses ennemis, mais qu’ils l’avaient enlevée dans quelques-unes de leurs incursions ; circonstance qui n’est pas impossible en elle-même, mais à laquelle il croit aussi fermement qu’à l’Écriture sainte. Il est surtout charmé par son talent pour la musique, qui est si parfait, qu’elle surpasse de beaucoup les meilleurs joueurs de harpe ou de clairshach de la contrée. On découvrit qu’elle produisait sur l’esprit troublé d’Allan, dans ses sombres rêveries, un effet bienfaisant, semblable à ceux qu’éprouvait autrefois le roi juif ; et le caractère d’Annette Lyle est si charmant, sa gaieté et son innocence sont si enchanteresses, qu’elle est regardée et considérée dans le château, plutôt comme la sœur du laird que comme une femme qu’il nourrit par charité. En vérité, il est impossible de la voir sans se sentir profondément ému par son ingénuité, sa douceur et sa gentillesse. — Prenez garde, milord, » dit Anderson en riant, « il y a du danger à exagérer un pareil éloge ; Allan Mac-Aulay, comme Votre Seigneurie le disait fort bien, ne serait pas un rival très-sûr. — Bah ! bah ! » dit lord Menteith, riant et rougissant en même temps, « Allan n’est pas accessible à la passion de l’amour ; et pour moi, ajouta-t-il plus gravement, la naissance inconnue d’Annette est une raison suffisante contre tout projet sérieux, et son état d’orpheline sans appui me défend de penser à tout autre.