Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 11, 1838.djvu/523

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trouverez avec les gens de Glenmorisson ; soyez son guide son interprète et son collègue. »

Allan Mac-Aulay jeta sur le comte un regard sombre et pénétrant, comme pour chercher à découvrir si cette mission improvisée ne lui était pas confiée dans quelque intention cachée qu’il ne lui révélait pas. Mais Montrose, habile à découvrir les motifs des autres, ne l’était pas moins à cacher les siens. Il regardait comme très-important, dans ce moment d’enthousiasme et de colère, d’éloigner Allan de son camp pour quelques jours, afin de mettre en sûreté, et son honneur l’exigeait, ceux qui lui avaient servi de guides. Quant à la querelle d’Allan avec Dalgetty, il pensait qu’elle serait facile à apaiser. Mac-Aulay en partant recommanda sir Duncan Campbell aux soins de son général ; et celui-ci donna sur-le-champ des ordres pour qu’il fût transporté en lieu de sûreté.

Il prit la même précaution à l’égard de Mac-Eagh, qu’il remit entre les mains des Irlandais, avec ordre que l’on prît soin de lui, et qu’aucun montagnard, de quelque clan qu’il fût, ne l’approchât.

Le comte monta ensuite un cheval de main que tenait un de ses gens, et parcourut le théâtre de sa victoire, qui était plus décisive qu’il n’avait osé s’en flatter au milieu même de ses ardentes espérances. Des trois mille hommes qui composaient la vaillante armée d’Argyle, la moitié avait péri sur le champ de bataille ou en fuyant. Ils avaient été repoussés principalement sur cette partie de la plaine où la rivière forme un angle avec le lac, de manière qu’il ne leur restait aucune porte de salut : un grand nombre, saisi de terreur, se précipita dans le lac et y perdit la vie ; quelques-uns plus heureux traversèrent la rivière à la nage, et plusieurs autres parvinrent à s’échapper en côtoyant la rive gauche du lac : le reste se jeta dans le vieux château d’Inverlochy ; mais, dénués de provisions et sans aucun espoir de secours, ils furent forcés de se rendre à condition qu’on leur permettrait de retourner tranquillement dans leurs foyers. Armes, munitions, étendards et bagages, tout tomba au pouvoir des vainqueurs.

Jamais la race de Diarmid, nom qu’on donnait aux Campbells dans les montagnes d’Écosse, n’éprouva un plus grand désastre. Jusqu’alors ils avaient été aussi heureux dans leurs entreprises qu’habiles à en concerter le plan et courageux à l’exécuter. Parmi les morts on trouva près de cinq cents hommes descendant de familles nobles et honorées. Selon l’opinion de la majeure partie des membres du clan, cette perte, quelque terrible qu’elle