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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/134

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déposée, « que dis-tu de ce joujou ? Veux-tu venir avec moi et être un maraudeur ?

— Que tous les saints du paradis nous en préservent, » s’écria la pauvre mère : puis craignant d’avoir offensé Christie par la vivacité de son exclamation, elle s’empressa d’ajouter que, depuis la mort de Simon, elle ne pouvait voir une lance, un arc, ou tout autre instrument de destruction, sans éprouver le plus violent serrement de cœur.

— Bah ! dit Christie, tu devrais prendre un autre mari, bonne dame, et chasser toutes ces folies de ta pensée : que dis-tu d’un vigoureux garçon comme moi ? Ma foi, cette vieille tour me paraît être en assez bon état de défense, et il ne manque pas de vallons, de rochers, de mares et de halliers, dans le cas où on serait serré de trop près. Un homme pourrait bien habiter ici, entretenir une dizaine de bons compagnons avec leurs chevaux, et, vivant de ce qu’il trouverait à la portée de sa main, avoir encore des complaisances pour toi, vieille donzelle.

— Hélas ! monsieur Christie, répondit Elspeth, comment pouvez-vous tenir de pareils discours à une pauvre veuve, et qui a la mort dans sa maison, pour comble d’affliction ?

— Veuve ; mais c’est une raison pour reprendre un mari. Ton vieux mari est mort ? bon ! il faut maintenant en choisir un autre qui soit d’une composition moins fragile, et qui ne meure pas de la pépie comme un jeune poulet. Ce sera mieux encore. Mais, allons, bonne dame, faites-moi donner quelque chose à manger, et nous parlerons de tout cela plus au long. »

La dame Elspeth, tout en connaissant bien le caractère de cet homme, qu’elle détestait et craignait, ne put s’empêcher de sourire en entendre ce discours.

« Tout ce qu’il voudra pourvu qu’il se tienne tranquille, » dit-elle tout bas au sous-prieur ; et elle rentra dans la tour, pour servir au cavalier ce qu’il désirait, se flattant que la bonne chère et le pouvoir de ses charmes occuperaient si bien Christie de Clint-Hill, que l’altercation entre lui et le moine ne se renouvellerait point.

Le sous-prieur n’avait non plus aucune envie de donner lieu sans nécessité à une rupture entre le monastère et un homme tel que Julien Avenel. Il sentait que la modération était aussi nécessaire que la fermeté pour soutenir l’édifice chancelant de l’Église de Rome, et il n’ignorait pas que tout au contraire des siècles