Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/156

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Cependant les visites que le bon père faisait de temps en temps ne furent pas inutiles à Édouard Glendinning et à Marie Avenel. Le premier montrait pour comprendre et pour retenir tout ce qu’on lui enseignait, une aptitude qui remplissait le père Eustache d’étonnement et d’admiration. Il était vif, laborieux, prompt et exact : rare combinaison de qualités, que l’on ne rencontre que dans les êtres les plus favorisés de la nature.

Le père Eustache désirait bien vivement que les excellentes dispositions qui se développaient de si bonne heure dans le jeune Édouard fussent consacrées au service de l’Église ; et il pensait qu’il serait facile d’obtenir le consentement du jeune homme, qui était naturellement tranquille, réfléchi et réservé, et paraissait considérer la science comme le principal objet et le plus grand plaisir de la vie. Quant à la mère, le sous-prieur ne doutait pas qu’habituée comme elle l’était à porter un profond respect aux moines de Sainte-Marie, elle ne se crût très heureuse de faire entrer un de ses enfants dans cette honorable communauté. Mais le bon père s’aperçut bientôt qu’il se trompait dans ces deux conjectures.

Lorsqu’il parlait à Elspeth Glendinning de ce qu’une mère aime le plus à entendre, des talents et des progrès de son fils, elle l’écoutait avec un extrême plaisir ; mais aussitôt que le père Eustache laissait entendre que c’était un devoir de consacrer à l’Église des talents qui semblaient faits pour en être la défense et l’ornement, la bonne dame cherchait à faire tomber la conversation sur un autre sujet. Lorsqu’il la pressait de plus près, elle alléguait l’impossibilité pour une veuve de porter toute la responsabilité des possessions qu’elle avait en fief : le désagrément qu’elle éprouverait de la part de ses voisins qui voudraient profiter de sa position abandonnée ; enfin le désir qu’elle avait qu’Édouard prît la place de son père, restât à la tour et lui fermât les yeux.

À cela le sous-prieur répondait que, même sous un point de vue mondain, elle assurerait le bien-être de sa maison en plaçant un de ses fils dans le monastère de Sainte-Marie, car il pourrait alors lui offrir une protection puissante. Quelle perspective plus riante que celle de voir son fils élevé en dignité ? Quoi de plus consolant que ce recevoir les derniers devoirs des mains d’un fils distingué par ses mœurs exemplaires et sa vie éminemment religieuse ? D’un autre côté, il cherchait à convaincre la bonne dame que son fils Halbert, que son caractère entreprenant et son penchant décidé pour une vie errante rendaient incapable de se livrer à l’é-