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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/350

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enfin, sur des lèvres qui, semblables au bouton de rose, étaient entr’ouvertes par le bonheur, et laissaient apercevoir une rangée de dents aussi blanches que des perles. Ce tableau était dangereux à contempler, et sir Piercy Shafton, après avoir répété l’offre, de moins en moins pressante, de conduire la belle Mysinda chez son père, finit par la prier de le suivre, « au moins, ajouta-t-il, jusqu’à ce que je puisse vous conduire en lieu convenable. »

Mysie Happer ne fit pas de réponse ; mais, rougissant de joie et de pudeur, donna en silence son consentement, en attachant son paquet et se préparant à monter en croupe. « Et que désirez-vous que je fasse de ceci ? » dit-elle en lui présentant la chaîne, comme si elle se fût aperçue pour la première fois qu’elle la tenait dans sa main.

« Gardez-la, belle Mysinda, pour l’amour de moi, dit le chevalier.

— Non pas monsieur, » répondit-elle gravement ; les jeunes filles de mon pays n’acceptent pas de semblables dons de leur supérieurs, et je n’ai pas besoin d’un souvenir pour me rappeler la matinée de ce jour. »

Le chevalier la supplia avec politesse de garder ce présent ; mais Mysie était décidée sur ce point : elle sentait peut-être qu’en acceptant une récompense, c’était en faire un service mercenaire ; elle promit seulement de cacher la chaîne, de crainte que ce bijou ne fît découvrir celui à qui il appartenait, jusqu’à ce que sir Piercy fût en lieu de sûreté.

Tous deux remontèrent à cheval, et se remirent en route pour continuer un voyage dont Mysie, aussi hardie et expérimentée sur ce point qu’elle était simple et susceptible dans d’autres, dirigea en quelque sorte l’itinéraire, ayant seulement demandé la direction générale, et reçu pour réponse que sir Piercy Shafton désirait aller à Édimbourg, où il espérait trouver des amis et des protecteurs. Après cette information, Mysie profita de la connaissance qu’elle avait du pays pour sortir aussi vite que possible du territoire de l’abbaye ; bientôt ils se trouvèrent dans les domaines d’un baron laïque, qu’on supposait attaché aux doctrines des réformés, et sur les terres duquel, au moins, Mysie présumait que ceux qui les poursuivraient n’oseraient hasarder aucun acte de violence. À la vérité, elle ne craignait pas beaucoup qu’on les poursuivît ; elle pensait, avec quelque raison, que les habitants de Glendearg auraient de la peine à surmonter les obstacles des