Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/429

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c’est aussi pour l’amour de moi, » dit-elle en s’adressant au cadavre. « Je sais que vous faites le mort pour m’effrayer ; mais je ne suis pas effrayée, » ajouta-t-elle en poussant avec effort un rire convulsif. Et changeant de ton aussitôt, elle l’engagea à lui parler, « ne fût-ce que pour maudire ma folie, dit-elle. Oh ! la plus rude parole que tu m’aies jamais adressée résonnerait pour moi à cette heure comme la plus amoureuse que tu m’aies jamais dite avant que je me fusse donnée à toi. Levez-le ; levez-le pour l’amour de Dieu ! N’avez-vous pas de pitié ? Il avait promis de m’épouser si je lui donnais un fils, et cet enfant ressemble si bien à son père ! Comment pourra-t-il exécuter sa promesse, si vous ne m’aidez pas à l’éveiller ? Christie de Clint-Hill, Rowley, Hutcheon ; vous étiez toujours à ses côtés dans ses jours de fête, et vous l’avez abandonné au jour du combat, vils et lâches serviteurs que vous êtes !

— Non, pas moi, de par le ciel ! » dit un homme mourant qui fit quelques efforts pour se lever sur le coude, et découvrit à Halbert les traits bien connus de Christie. « Je n’ai pas reculé d’un pied, mais un homme ne peut combattre que tant qu’il lui reste l’haleine, et la mienne s’en va bien promptement. Ainsi, jeune homme, » ajouta-t-il, en jetant les yeux sur Glendinning et voyant son équipement militaire, « tu as donc pris le casque, enfin ? C’est un meilleur bonnet pour vivre que pour mourir. Je voudrais que le hasard eût amené ton frère ici en ta place. Il y a du bon en lui ; mais toi, tu es un vaurien, et tu seras bientôt aussi méchant que moi.

— Dieu m’en préserve ! » dit Halbert vivement.

Amen de tout mon cœur, dit le blessé ; il y aura assez de monde sans toi où je vais. Mais Dieu soit loué ! ma main n’est pour rien dans cette action cruelle, » ajouta-t-il en jetant les yeux sur la pauvre Catherine. Sa bouche fit une exclamation qui ressemblait autant à une prière qu’à un jurement, et son âme partit pour aller devant son juge.

Profondément rempli de l’intérêt douloureux que ces tristes événements avaient excité en lui, Glendinning oublia pour un moment sa position et ses devoirs, et il y fut brusquement rappelé par un bruit de chevaux, et le cri de « Saint-George pour l’Angleterre ! » que poussaient les soldats anglais. Ses cavaliers, fort peu nombreux, car la plupart des traînards avaient attendu l’arrivée du comte de Murray, restaient à cheval, tenant leurs lances droites, n’ayant pas d’ordre de se rendre ou de résister.