Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 13, 1838.djvu/85

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lents de leur âge, et de courir de tous côtés dans la salle, derrière les sièges des membres plus âgés de la famille ; ils avaient encore la faculté de faire des excursions dans un ou deux petits appartements qui aboutissaient à cette salle, et qui leur fournissaient d’excellents moyens de jouer à cache-cache. Ce soir-là, les enfants ne parurent pas disposés à user du privilège qu’ils avaient de visiter ces régions sombres, et préférèrent circonscrire leurs gambades dans le voisinage de la lumière.

Pendant ce temps-là Alice d’Avenel, assise près d’un chandelier de fer qui soutenait une torche informe de fabrique domestique, lisait de petits passages détachés dans un gros livre à fermoir, qu’elle conservait avec le plus grand soin. Elle avait appris à lire dans un couvent où elle avait passé sa jeunesse ; mais depuis quelques années, elle n’avait fait usage de sa science que pour lire ce volume, qui composait toute sa bibliothèque. La famille écoutait les fragments qu’elle choisissait, les regardant comme de bonnes choses qu’il y avait du mérite à entendre avec respect, qu’on les comprît parfaitement ou non. Alice avait résolu d’expliquer plus tard à sa fille les mystères de ce livre ; mais, à cette époque, une pareille connaissance exposait à des dangers personnels, et il y aurait eu de l’imprudence à la confier à un enfant.

Le bruit que faisaient les enfants en jouant interrompait de temps en temps la lecture de la dame, et attira bientôt sur les bruyants coupables une réprimande de la part d’Elspeth.

« S’il fallait absolument qu’ils fissent tout ce tapage, ne pourraient-ils aller plus loin, et laisser milady faire la lecture de ces belles paroles ? » À cela elle joignit la menace de les envoyer coucher s’ils n’étaient pas plus tranquilles. Pour se conformer à cette injonction, les enfants jouèrent d’abord un peu plus loin de la compagnie, et avec moins de bruit ; puis, impatients de la contrainte qu’on leur imposait, ils se mirent à parcourir les appartements voisins. Mais tout à coup les deux garçons rentrèrent dans la salle, la bouche béante, disant qu’il y avait un homme armé dans le spence[1].

« Ce doit être Christie de Clint-Hill[2], » dit Martin en se levant. « Quel motif peut l’amener ici à l’heure qu’il est ?

— Ou plutôt comment y est-il entré ? dit Elspeth.

  1. Mot écossais pour désigner l’appartement intérieur ou la salle à manger dont il va être parlé plus loin. a. m.
  2. Clint, mot écossais pour stony, pierreux, hill, colline. a. m.