Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 15, 1838.djvu/96

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

il n’y aurait rien à dire, et moi-même je désire quelquefois me retirer du monde où je suis comme cloué, et vivre comme un des plus pauvres de notre église.

— C’est ce qui pourra bien arriver, Tony, répondit Varney ; mais je crois que le diable te tiendra peu de compte de ta pauvreté forcée, et que de cette manière tu y perdras toujours. Mais suis mes conseils, et Cumnor-Place te restera… Garde le silence sur la visite de ce Tressilian… n’en souffle mot jusqu’à ce que je te le dise.

— Et pourquoi, je vous prie ? » dit Foster d’un ton de défiance.

« Sot que tu es ! Dans la disposition d’esprit où se trouve milord, ce serait le moyen le plus sûr de le confirmer dans ses projets de retraite que de lui apprendre qu’en son absence un pareil spectre est venu visiter sa femme. Alors il voudrait faire comme ce dragon qui veillait lui-même sur ses pommes d’or ; et toi, Tony, ton rôle serait fini. Un mot suffit au sage… Adieu.. Il faut que je le suive. »

Il fit faire volte-face à son cheval, lui donna de l’éperon, et franchit la voûte pour rejoindre son maître.

« Puisse ton rôle finir aussi, puisses-tu te rompre le cou, maudit complaisant ! dit Antony Foster. Mais je suivrai son avis, car nos intérêts sont les mêmes, et il dispose comme il veut de cet orgueilleux comte. Jeannette pourtant me remettra ses pièces d’or… elles seront employées d’une manière ou d’autre pour le service de Dieu, et je les mettrai à part dans mon coffre-fort jusqu’à ce que je trouve à en faire un usage convenable. Il ne faut pas qu’aucune vapeur contagieuse empoisonne Jeannette… elle restera pure comme une émanation divine, ne fût-ce que pour prier Dieu pour son père… J’ai besoin de ses prières, car je suis dans une passe difficile… D’étranges rapports ont été faits sur mon genre de vie. La congrégation me regarde avec froideur, et quand M. Holdforth a comparé les hypocrites à un sépulcre blanchi, dont l’intérieur est rempli d’ossements humains, il m’a semblé qu’il me regardait. La religion romaine était commode ; Lambourne disait vrai. Un homme n’avait qu’à travailler à sa fortune par tous les moyens qui s’offraient à lui… dire son rosaire, entendre la messe, et se faire absoudre. Ces puritains suivent une route plus difficile et plus dure ; mais j’essaierai… Je vais lire ma bible pendant une heure avant de retourner faire visite à mon coffre de fer. »

Cependant Varney galopait après son maître, qu’il trouva l’attendant à la petite porte du parc.

« Vous perdez du temps, Varney, dit le comte, et le temps passe.