Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/284

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manquèrent pas de faire impression sur lui, tout indifférent, tout insouciant qu’il paraissait être. Mais la singulière occupation de Norna ne fut pas plus tôt terminée, que, pénétrant avec quelque peine dans le cimetière, car il lui fallut enjamber les ruines délabrées du mur, il alla se présenter devant elle. Loin de tressaillir, ou de montrer la moindre surprise à son apparition dans un lieu si solitaire, elle dit d’un ton qui semblait annoncer qu’il avait été attendu : « Ainsi… vous m’avez enfin cherchée ? — Et trouvée, répondit Mertoun, pensant qu’il arriverait mieux aux renseignements qu’il voulait demander, en prenant un ton analogue au sien.

« Oui, répliqua-t-elle, vous m’avez trouvée, et dans un lieu où tout le monde doit se rencontrer… dans le sanctuaire de la mort. — Il est vrai, c’est là que nous devons enfin nous réunir tous, » reprit Mertoun en promenant ses regards sur cette scène de désolation, où les principaux objets qui frappaient la vue étaient des marbres à demi couverts de sable, et des pierres sépulcrales que les tempêtes avaient arrachées aux tombeaux, toutes chargées d’inscriptions et de sculptures représentant des emblèmes funèbres. « Ici, dans ce palais de la mort, doivent se rencontrer enfin tous les hommes : bienheureux les mortels qui entrent les premiers dans le port du repos ! — Celui qui ose désirer ce port, dit Norna, doit avoir sagement dirigé sa course dans le voyage de la vie. Je n’ose pas espérer un port si paisible ; et toi, l’oses-tu attendre ? la course que tu as fournie l’a-t-elle mérité ? — Ce n’est pas ce motif qui m’amène ; j’ai à vous demander quelles nouvelles vous pouvez me donner sur mon fils Mordaunt Mertoun ? — Un père demander à une étrangère des nouvelles de son fils ! Comment saurais-je la moindre chose sur son compte ? Le cormoran ne dit pas au héron : « Où sont mes petits ?» — Laissez cette inutile affectation de mystère : sur le vulgaire elle peut produire de l’effet ; avec moi elle n’aboutit à rien. Les paysans de Jarlshof m’ont dit que vous saviez ou pouviez savoir quelque chose sur Mordaunt, qui n’est pas revenu chez moi depuis les fêtes de Saint-Jean qu’il a passées au château de votre parent, Magnus Troil. Donnez-moi des renseignements, si en effet vous en possédez ; la récompense ne se fera guère attendre, s’il est en mon pouvoir de vous récompenser. — La surface ronde de la terre ne renferme rien qui puisse me récompenser du moindre mot que je jette dans l’oreille d’un être vivant ; mais quant à ton fils, si tu désires le voir en vie, rends-toi à la prochaine foire de Kirkwall, dans les îles Orcades. — Et comment s’y trouve-t-il ?