Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 16, 1838.djvu/335

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— Bien ! bien !… qu’en résulte-t-il ? répéta le jeune homme ; voilà une bien brève manière de remercier les gens. Voyez-vous, capitaine, Benson, Barlow, Dick Fletcher, et quelques autres, nous vous souhaitons du bien, et nous avons fait rester votre vieux camarade le capitaine Goffe dans ces parages, pour vous attendre, tandis que lui et Hawkins, et la plus grande partie de l’équipage du bâtiment, auraient voulu cingler vers la Nouvelle-Espagne pour reprendre le vieux métier. — Plût à Dieu que vous vous fussiez seulement mêlé de vos affaires, en m’abandonnant à mon destin ! — Qui aurait consisté à être accusé et pendu, capitaine, la première fois qu’un de ces bandits de Hollandais ou d’Anglais, dont vous avez allégé les cargaisons, aurait jeté les yeux sur vous ; et il n’existe pas d’endroit où l’on rencontre plus de marins que dans ces îles. C’est pour vous garantir d’un tel risque que nous avons perdu ici un temps précieux. Car pendant ce temps les insulaires sont devenus fort exigeants, et quand nous n’aurons plus ni marchandises ni argent à répandre parmi eux, les drôles jetteront le grappin sur le vaisseau. — Eh bien, alors, pourquoi ne décampez-vous pas sans moi ? Le partage s’est fait d’après les lois de l’équité, et tout le monde a eu sa part… que chacun fasse comme il lui plaît. J’ai perdu mon vaisseau ; et après avoir été capitaine, je ne me remettrai pas en mer sous le commandement de Goffe ni de personne autre. D’ailleurs, vous savez bien que Hawkins et lui m’en veulent parce que je les ai empêchés de couler à fond le brick espagnol avec les pauvres diables de nègres qui étaient à bord. — Est-ce que le diable vous possède ? Êtes-vous encore Clément Cleveland, notre ancien et vaillant Clem du Cleug ? Que parlez-vous d’avoir peur de Hawkins, de Goffe, et d’une vingtaine de coquins semblables, quand vous m’avez, moi, ainsi que Barlow et Dick Fletcher pour vous soutenir ? Quand est-ce que nous vous avons abandonné dans le conseil ou dans l’action, pour craindre de nous voir déserter aujourd’hui ? Quant à servir sous Goffe, ce n’est pas chose nouvelle, pour des gentilshommes de fortune qui tâchent de s’enrichir, que de changer de capitaine de temps à autre. Mais laissez-nous faire, vous serez capitaine ; car la mort me saisisse tout endormi, si je sers sous ce drôle de Goffe, qui est aussi véritablement chien qu’aucun chien du monde ! Non, non, je vous remercie… mon capitaine doit avoir un peu du gentilhomme chez lui. D’ailleurs, vous savez que c’est vous qui trempâtes le premier mes mains dans l’eau salée, et, de comédien ambulant sur la terre, m’avez fait rôdeur sur la