Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/473

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duire en présence du roi ? Ou l’enfer le favorise, ou le ciel se mêle des choses d’ici-bas plus que je ne pensais. Dans ce cas, que Dieu nous pardonne, à nous qui croyions qu’il ne s’occupait aucunement de nous ! — Amen, très-dévot Christian ; je suis charmé de voir qu’il vous reste encore quelque teinte de grâce qui vous fasse parler ainsi. Mais Empson, la Chiffinch femelle, et une demi-douzaine d’autres personnes, ont vu le berger entrer et partir. Interrogez, je vous prie, ces témoins avec votre sagesse habituelle, si vous ne croyez pas pouvoir mieux employer votre temps en courant sur les traces des fugitifs. Je crois qu’il s’est introduit comme faisant partie d’une troupe de masques ou de danseurs. Rowley, vous le savez, est toujours accessible pour quiconque peut contribuer à le divertir. C’est ainsi que s’est faufilé ce terrible héros, comme Samson parmi les Philistins, pour faire écrouler nos beaux projets sur nos têtes. — Je vous crois, milord ; je ne puis que vous croire ; et je vous pardonne, puisque telle est votre nature, de plaisanter de tout ce qui est ruine et destructions Mais quelle route ont-ils prise ? — Celle du comté de Derby, je présume ; car elle parlait de retourner se mettre sous la protection de son père, et de laisser là la vôtre, maître Christian. Il s’était passé chez la Chiffinch des choses qui lui donnaient lieu de soupçonner que vous n’aviez pas agi envers la fille d’une manière qui dût être approuvée par le père. — Alors, Dieu soit loué ! elle ne sait pas que son père est à Londres, et ils auront gagné le château de Martindale ou le manoir de Moultrassie : dans l’un de ces cas comme dans l’autre, ils sont en mon pouvoir. Il faut cependant que je les suive de près. Je vais retourner tout de suite dans le comté de Derby. Je suis perdu si elle voit son père avant que toutes ces bévues soient réparées. Adieu ! milord. Je vous pardonne la part que je vous soupçonne d’avoir prise au renversement de nos projets : ce n’est pas le moment des reproches mutuels. — Vous dites vrai, maître Christian, et je vous souhaite un plein succès. Puis-je vous aider d’homme, de chevaux ou d’argent ? — Je remercie Votre Grâce, » dit Christian ; et il sortit en toute hâte.

Le duc écouta le bruit de ses pas tandis qu’il descendait l’escalier, et losrqu’il ne les entendit plus, il cria à Jerningham qui entrait : Victoria ! Victoria ! magna est veritas, et prœvalebit[1] ! Si j’avais dit à ce vilain un seul mot de mensonge, il est si familier

  1. Victoire ! victoire ! Grande est la vérité, elle prévaudra. a. m.