Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/579

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

qu’elle n’ajoute rien à la splendeur de votre cour, répondit le duc ; mais elle ne saurait l’être pour moi. C’était précisément aujourd’hui jour d’exécution à York-Place ; et mon club de pendables était en train de se livrer à la joie, lorsque les ordres de Votre Majesté sont arrivés. Je ne pouvais me trouver en compagnie d’Ogle, de Maniduc, de Dawson et autres, sans être obligé à quelques réparations dans ma toilette et à quelques ablutions avant d’entrer dans ce cercle. — J’espère que la purification sera complète, » dit le roi, sans adoucir en aucune sorte, par son sourire habituel, des traits qui étaient naturellement sombres, durs, et même sévères. « Nous désirerions avoir quelques explications de Votre Grâce au sujet d’une mascarade musicale que vous nous destiniez, mais qui a échoué, comme on nous le donne à entendre. — Il faut en effet que le succès ait bien peu répondu à mon attente, dit le duc, puisque Votre Majesté en paraît si contrariée. Je croyais, en envoyant le contenu de ce violoncelle, faire plaisir à Votre Majesté (car je l’ai vue avoir la condescendance de paraître s’amuser de semblables bagatelles) ; mais je crains que la plaisanterie n’ait déplu, je crains que le feu d’artifice n’ait fait quelque mal. — Non pas le mal qu’il était destiné à faire peut-être, » dit gravement le roi. « Vous voyez, milord, qu’aucun de nous n’a été atteint par les flammes, et que nous sommes tous sains et saufs. — Puisse Votre Majesté l’être long-temps ! dit le duc ; cependant je m’aperçois qu’il y a dans tout ceci quelque chose que l’on a mal interprété : ce doit être une faute impardonnable, quoique commise sans intention, puisqu’elle a pu déplaire à un maître si indulgent. — Trop indulgent en effet, Buckingham, répliqua le roi ; et le fruit de mon indulgence a été de changer des hommes loyaux en traîtres. — Avec la permission de Votre Majesté, je ne puis comprendre ceci, dit le duc. — Suivez-nous, milord, répondit Charles, et nous essaierons de vous expliquer notre pensée. »

Accompagné des mêmes seigneurs qui se tenaient autour de lui, et suivi du duc de Buckingham, sur lequel tous les yeux étaient fixés, Charles se retira dans le cabinet qui avait été dans la soirée le théâtre de fréquentes consultations. Là, s’appuyant les bras croisés sur le dos d’un fauteuil, Charles procéda à l’interrogatoire du noble suspect.

« Soyons francs l’un envers l’autre ; parlez, Buckingham, quelle devait être, en un mot, la surprise que vous nous ménagiez pour ce soir ? — Une petite mascarade, sire. J’avais l’intention de