Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/580

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

faire sortir de cet instrument une petite danseuse que j’espérais devoir plaire, par ses talents, à Votre Majesté. Il renfermait aussi quelques pièces de feu d’artifice chinois, parce que, m’étant imaginé que le divertissement aurait lieu dans la salle de marbre, je pensais qu’on pourrait les faire partir de manière à produire un effet agréable et sans le moindre danger, au moment où ma petite magicienne apparaîtrait ; elles étaient destinées à masquer, pour ainsi dire, son entrée en scène. J’espère qu’il n’y a pas eu de perruques brûlées, de dames effrayées, ni d’espoir de noble lignée éteint par cette plaisanterie mal conçue ? — Nous n’avons point vu de feu d’artifice, milord, et votre danseuse, dont nous entendons maintenant parler pour la première fois, s’est présentée à nous sous la forme de notre vieille connaissance, Geoffrey Hudson, pour qui le temps de danser est certainement passé. — Votre Majesté me surprend ! Je vous en supplie, faites venir… Christian… Édouard Christian. Il loge dans une grande et vieille maison, près de la boutique de Sherper l’armurier, dans le Strand. Aussi sûr que je vis de pain, sire, je l’ai chargé de l’arrangement de cette fête ; la petite danseuse lui appartient. S’il a fait quelque chose qui ait gâté mon concert ou porté atteinte à ma réputation, il mourra sous le bâton. — Il est singulier, dit le roi, et je l’ai souvent observé, que ce Christian porte le blâme des actions de tout le monde : il joue le rôle ordinairement assigné, dans une nombreuse famille, à cet être malfaisant que l’on nomme Personne. Lorsque Chiffinch fait des sottises, il en charge toujours Christian ; quand Sheffield écrit une satire, je suis sûr d’apprendre que Christian l’a corrigée, ou copiée, ou distribuée : c’est l’âme damnée de chacun à ma cour, le bouc émissaire sur qui retombent toutes les iniquités, et il aura un terrible fardeau à porter dans le désert. Mais il est particulièrement et régulièrement chargé de tous les péchés de Buckingham, et je suis convaincu que Sa Grâce compte que Christian doit subir, dans ce monde ou dans l’autre, tous les châtiments qu’elle a encourus. — Non, sire, » reprit le duc, du ton le plus respectueux, « je n’ai pas l’espoir d’être pendu ou damné par procuration ; mais il est clair que quelqu’un s’est permis de revoir et de changer mon projet. Si quelque chose m’est imputé, qu’on me fasse au moins connaître l’accusation et voir l’accusateur. — C’est juste, dit le roi. Faites sortir notre petit ami de derrière la cheminée. (Hudson étant en conséquence tiré de sa cachette, le roi continua) : Voilà le duc de Buckingham : répé-