Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/582

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On reprit alors avec plus de régularité la discussion de son témoignage, et Ormond fut le premier à observer que le petit homme en disait plus qu’on ne l’avait d’abord pensé, puisqu’il parlait d’une conversation fort extraordinaire et criminelle, tenue par les gens du duc qui l’avaient transporté au palais.

« Je sais que les discours charitables de milord d’Ormond ne manqueront jamais de me rendre un bon office dans l’occasion, » dit le duc avec dédain : « mais je le défie, lui et tous mes autres ennemis ; et il me sera aisé de prouver que cette prétendue conspiration, si elle a quelque fondement, n’est qu’un stratagème pour détourner de dessus les catholiques l’odieux qui s’attache si justement à leur secte, et le faire retomber sur les protestants. Voici une créature qui était à moitié chemin de la potence, et qui, le jour même où elle échappe à la main du bourreau, avec qui tout le monde pense qu’elle méritait de faire plus ample connaissance, vient chercher à noircir la réputation d’un pair protestant. Et qu’allègue-t-elle ? Une conversation décelant un projet de haute trahison, qu’ont tenue trois ou quatre musiciens allemands ; conversation entendue à travers les fentes d’un étui de violoncelle, et cela, tandis que ce marmouset était renfermé dedans, porté sur les épaules d’un homme. Le petit coquin, en répétant leur langage, montre qu’il comprend aussi peu l’allemand que mon cheval ; et quand même il aurait bien entendu, saisi exactement, et rapporté sans se tromper ce qu’ils disaient, est-ce que, même dans ce cas, mon honneur doit être compromis par le discours que tiennent de tels gens, avec qui je n’ai jamais eu d’autres rapports que ceux qui pouvaient concerner leur profession. Pardonnez-moi, sire, si j’ose ajouter que les hommes d’état profonds qui essayèrent d’étouffer la conspiration papiste, par le prétendu complot du tonneau de farine, n’obtiendront guère plus de crédit cette fois par leurs fictions établies sur des violoncelles et des concertos. »

Les conseillers présents s’entre-regardèrent ; Charles tourna sur les talons, et marcha à grands pas dans le cabinet. En ce moment, on annonça que les Peveril père et fils venaient d’arriver au palais, et le roi donna l’ordre de les introduire en sa présence.

Ils avaient reçu l’injonction de se rendre à la cour dans un moment plein d’intérêt pour eux. Après avoir été relâchés par Bridgenorth de la manière et aux conditions dont le lecteur doit avoir