Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 18, 1838.djvu/95

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taker, les seules personnes qui eussent connaissance du panneau glissant, l’avaient totalement oublié. Il était probable qu’il n’avait pas été refermé exactement, et qu’il était resté une ouverture suffisante pour indiquer son existence à Bridgenorth, qui, étant parvenu à le faire glisser, avait pénétré dans l’appartement secret avec lequel il communiquait, et avait de là gagné la poterne du château, par un autre passage secret pratiqué dans l’épaisseur des murs : ce qui est assez commun dans les anciens manoirs, dont les barons étaient exposés à tant de revers de fortune, qu’ordinairement ils avaient soin de se ménager des lieux de retraite où ils pussent se réfugier dans les moments de danger, et de s’assurer les moyens de sortir furtivement de leurs forteresses. Il était évident que Bridgenorth avait découvert ce passage et en avait profité ; car les portes secrètes qui conduisaient à la poterne étaient encore ouvertes, ainsi que le panneau mobile de la chambre dorée.

Sir Geoffrey revint dans l’appartement des dames avec l’air d’un homme inquiet. Tant qu’il avait cru Bridgenorth en son pouvoir, il n’avait rien redouté : car il se sentait supérieur à lui, autant par la force physique que par cette sorte de courage qui pousse un homme à se précipiter sans hésitation au milieu du danger ; mais une fois le major éloigné, il commença à le craindre davantage. Il avait été habitué pendant tant d’années à considérer comme redoutables le pouvoir et l’influence de Bridgenorth ; et même alors, malgré le changement survenu dans les affaires publiques, il regardait encore son voisin comme un ami si puissant ou un ennemi si dangereux, qu’il s’alarma pour la sûreté de la comtesse plus qu’il ne voulait se l’avouer à lui-même. Quant à elle, remarquant sa mine soucieuse, elle lui demanda s’il pensait que son séjour au château pût lui occasionner quelque embarras et l’exposer à quelque danger.

« L’embarras serait bienvenu et accepté avec joie, répondit sir Geoffrey ; le danger encore plus volontiers, puisque la cause en serait si belle. Mon projet était de prier Votre Seigneurie d’honorer Martindale de votre présence pendant quelques jours, ce qui aurait facilement été tenu secret jusqu’à ce que les recherches sur votre personne eussent été terminées. Si j’avais pu voir ce drôle de presbytérien, je l’aurais certainement forcé à agir avec prudence ; mais le voilà libre et hors de mon atteinte, et, ce qu’il y a de pire, il connaît le secret de la chambre du prêtre. »