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Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 19, 1838.djvu/69

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dinaire, et destinée à recevoir les nobles et tous ceux qui étaient attachés au service dans le château voisin, où Louis XI permettait bien rarement à qui que ce fût d’entre eux d’avoir un appartement, à moins d’absolue nécessité. Un écusson portant des fleurs de lis était suspendu au-dessus de la principale porte de ce bâtiment irrégulier ; mais ni dans la cour, ni dans la maison, on ne remarquait ce mouvement qui annonce des hôtes nombreux et une grande activité commerciale. On eût dit que le caractère sombre et discourtois de la résidence royale située dans le voisinage, avait communiqué une portion de sa grave et épouvantable tristesse, même à une maison destinée à être le temple de la sociabilité, du plaisir et de la bonne chère.

Maître Pierre, sans appeler personne, et même sans approcher de la principale entrée, leva le loquet d’une porte qui se trouvait devant lui, et entra dans une grande salle où son compagnon le suivit. La flamme d’un fagot pétillait dans la cheminée, près de laquelle tout était disposé pour un déjeuner solide.

« Mon compère a eu soin que rien ne manquât, » dit le Français à Durward : « vous devez avoir froid, et voilà du feu ; vous devez avoir faim, et bientôt vous allez déjeuner. »

Il siffla ; l’aubergiste parut, et répondit à son bonjour par une inclination de tête, mais ne montra rien de cette loquacité particulière aux aubergistes français de tous les siècles.

« J’ai envoyé quelqu’un vous commander un déjeuner, dit maître Pierre, l’a-t-il fait ? »

L’aubergiste ne répondit que par un signe affirmatif, et bientôt se mit en devoir d’apporter et d’arranger sur la table les divers mets préparés pour un excellent déjeuner : cette opération se fit sans qu’il prononçât un seul mot pour en relever le mérite. Cependant le repas avait droit à tous les éloges que les aubergistes français ont coutume de faire de leurs talents, comme le lecteur le verra dans le chapitre suivant.