Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 20, 1838.djvu/440

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

bliez guère à un covenantaire, nous boirons à la mémoire du Covenant, tenez ! — Dieu ! n’est-ce pas à vous faire hausser les épaules qu’une méchante mesure comme celle-ci ? la voilà déjà vide. — Ma maison du clos me produisait un revenu d’environ quatorze livres sterling par an, depuis la cave jusqu’au grenier, sans compter encore un superbe cellier que je louais à la mère Littleworth.

— Et vous rappelez-vous que vous aviez pour locataire une pauvre vieille dame, mistress Cantrips de Kittlebasket ? » demanda Nanty en ne cachant qu’avec peine son émotion.

— Si je me le rappelle ! Corbleu ! j’ai bonne raison de me le rappeler, dit Pierre, puisqu’elle m’a fait banqueroute, la vieille sorcière ; et après tout ce que put faire la loi pour me satisfaire et me payer, en l’expropriant de ses biens, en les vendant à la criée et à l’encan, elle se réfugia dans la maison de charité, et m’emporta vingt bonnes livres d’Écosse qu’elle me devait toujours. — C’est une honte et une grande oppression que la maison de charité, donnant asile aux banqueroutiers qui ne peuvent payer leurs honnêtes créanciers.

— Il me semble, l’ami, dit le quaker, que tes haillons devraient t’apprendre à avoir compassion de la nudité des autres.

— Haillons ! » s’écria Peebles prenant les paroles de Josué à la lettre ; « voit-on jamais un homme sage mettre son plus bel habit pour voyager, dans la vue de faire compagnie avec des quakers, et tel autre bétail que l’on rencontre en route ?

— La vieille dame est morte à ce que j’ai appris, » répliqua Ewart avec une indifférence affectée, que trahissait une voix qui tremblait de colère.

— Morte ou vivante, que m’importe à moi ? répondit Pierre le Cruel. Quelle nécessité de vivre, je vous le demande, quand on ne vit pas comme la loi le veut, quand on ne satisfait pas ses justes et légitimes créanciers ?

— Et vous, — vous-même qu’on foule maintenant aux pieds, qui gisez maintenant étendu dans le ruisseau, n’êtes-vous pas fâché de ce que vous lui avez fait ? ne vous repentez-vous pas d’avoir occasionné la mort de cette pauvre veuve ?

— De quoi me repentirais-je ? La loi était de mon côté, — décrets des baillis ordonnant saisie et plaçant des gardiens, — demande tendant à faire cesser les poursuites, — arrêt qui les déclare valables ! que vouliez-vous de plus ? J’ai suivi la vieille radoteuse