Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 23, 1838.djvu/229

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mascarade. Le carnaval est fini et le carême a commencé. — Notre monarque a abdiqué ce soir plus tôt que de coutume, » dit un des individus de la bande joyeuse. Mais comme le prince n’encouragea pas cette plaisanterie, ses gens qui, pour l’instant, ne brillaient pas pour la sobriété, tâchèrent d’en prendre l’apparence, et toute la bande imita l’extérieur de personnes décentes, qui, surprises dans une partie de débauche, essaient de cacher leur état présent sous une double dose de gravité et de décorum. Le prince ayant à la hâte changé ses habits, fut conduit dehors, éclairé par le seul homme sobre de la compagnie ; mais, chemin faisant, il faillit tomber sur le corps endormi du sauvage Bonthron. — Comment !… cette vile brute est-elle encore sur notre passage ? » s’écria-t-il avec colère et dégoût. « Ici, quelqu’un ! jetez ce scélérat dans le bac aux chevaux pour qu’il prenne un bain une fois en sa vie. »

Pendant qu’on exécutait ses ordres, au moyen d’une fontaine placée dans la cour intérieure, et que Bonthron essuyait un châtiment auquel il était incapable de résister autrement que par quelques gémissements inarticulés et par des grognements semblables à ceux d’un sanglier mourant, le prince se rendit à ses appartements dans une maison appartenant aux comtes d’Errol, et qu’on nommait le logement du connétable. Chemin faisant, pour se distraire de pensées affligeantes, il demanda à son compagnon comment il possédait encore sa raison quand tous ses camarades l’avaient depuis si long-temps perdue par l’effet des liqueurs. — Avec la permission de Votre Grâce, répondit l’Anglais Wat, je vous confesse qu’il m’arrive souvent de garder ma tête quand il plaît à Votre Grâce d’ordonner à notre troupe de s’enivrer : comme ils sont tous Écossais, excepté moi, j’ai pensé qu’il ne serait pas sage de me trouver ivre dans leur compagnie, car ils m’endurent à peine quand nous sommes tous à jeun ; et si quand leurs esprits sont exaltés par le vin, je venais débiter un conte de ma façon, je pourrais bien en être payé par autant de coups de poignard qu’il y a d’hommes dans la troupe. — Ainsi, c’est un parti arrêté chez toi de ne prendre part à aucune des orgies qui se célèbrent dans notre maison ? — Oui, avec votre permission, à moins qu’il ne plaise à Votre Grâce d’ordonner à ses gens de passer un jour sans boire, afin que Will Watkins puisse s’enivrer sans crainte. — Cela pourra se faire… Où sers-tu, Watkins ? — Dans l’écurie, avec votre permission. — Nous dirons à notre