Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/352

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et accosta la fille d’une centaine d’aïeux comme il aurait abordé une laitière. Miss Mowbray se plaignit… sa compagne jeta les hauts cris… arriva le cousin Francis, fusil sur l’épaule, qui mit le rustre en fuite.

« Tel fut le commencement d’une liaison qui fit de grands progrès avant que je la découvrisse. La belle Clara, à ce qu’il paraît, trouva plus sûr d’errer dans le bois avec une escorte : et mon studieux et sentimental parent devint son constant compagnon. À leur âge, il était probable qu’il se passerait quelque temps avant qu’ils pussent se comprendre ; mais une confiance et une intimité parfaites s’étaient établies entre eux avant que je connusse leur amour.

« Il faut que je fasse ici une pause jusqu’à demain, Harry ; je vous enverrai la suite dans une prochaine lettre. La blessure que j’ai reçue l’autre jour à l’épaule me répond encore dans le bout des doigts : n’allez donc pas critiquer mon écriture.


CHAPITRE XXVI.

SECONDE LETTRE.


… Faut-il donc que je raconte moi-même l’histoire de mes folies ?…
Shakspeare.


« Je reprends la plume, Harry, pour vous dire quelle fut ma surprise lorsque Francis me prit pour confident de son intrigue amoureuse. Mon grave cousin amoureux, et sur le point de s’embarquer dans le voyage périlleux d’un mariage clandestin !… Je ne pourrais dire, quand ma vie en dépendrait, si ce fut un sentiment de surprise ou de joie maligne qui l’emporta en moi. Je voulus lui faire des représentations, mais je n’avais pas le talent de persuader. Il insista sur la différence de nos situations… sur sa malheureuse naissance qui l’affranchissait du moins d’une soumission complète aux volontés absolues de son père… Un parent de sa mère lui avait laissé une fortune modeste que miss Mowbray avait consenti à partager avec lui ; enfin, il désirait non mes conseils mais mon assistance. Un instant de réflexion me convainquit que je devais seconder ce pauvre Francis : je me rappelai les déclamations de notre très honorable père contre les mariages à l’écossaise et contre tous les mariages secrets en général. Or, il ne fallait pas être sorcier pour prévoir que, si Francis transgressait la défense de se marier en Écosse, mon père ne songerait certainement plus à l’a-