Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 25, 1838.djvu/71

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espèce de froideur insultante qui dominait dans toutes ses manières. Son effronterie ne manqua pas de produire un effet violent sur sir John de Walton, qui s’écria soudain : « Aux armes ! aux armes ! assurez-vous de ce traître, de cet espion ! Holà ! pages et archers, William, Anthony, Bend-the-Bow et Greenleaf, saisissez ce traître, et attachez-le avec vos cordes d’arc et vos laisses à chiens ; attachez-le, vous dis-je, et serrez si fort que le sang lui sorte de dessous les ongles. — Voilà ce qui s’appelle parler, » dit Turnbull avec une espèce de gros rire. « Si j’étais aussi sûr d’être entendu par une vingtaine d’hommes que je pourrais nommer, nous ne disputerions pas long-temps les honneurs de la journée. »

Les Anglais entourèrent le chasseur en grand nombre, mais ne mirent pas la main sur lui, personne ne voulant être le premier à rompre la paix si nécessaire à la circonstance.

« Dis-moi, lui demanda de Walton, traître que tu es ! pourquoi tu te trouves ici ? — Uniquement et simplement, répondit l’habitant de la forêt de Jed, afin de pouvoir livrer à Douglas le château de ses ancêtres, et te payer ce que nous te devons, sire Anglais, en réduisant au silence ce gosier à l’aide duquel tu fais un pareil tapage. »

En même temps, s’apercevant que les archers se rassemblaient derrière lui pour mettre les ordres de leur chef à exécution aussitôt qu’ils seraient réitérés, le chasseur se retourna brusquement vers ceux qui semblaient vouloir l’empoigner à l’improviste ; et les forçant par cette évolution soudaine à reculer d’un pas, il reprit : « Oui, John de Walton, mon but en venant ici était de te mettre à mort comme un homme que je trouve en possession du château et des domaines de mon maître, plus digne chevalier que toi ; mais je ne sais pourquoi j’ai hésité : peut-être la raison en est-elle que tu m’as donné à manger quand je mourais de faim depuis vingt-quatre heures. Je n’ai donc pas eu le cœur de te payer, comme je l’aurais pu faire, la récompense qui t’était due. Quitte ce lieu et cette contrée, et profite de l’avertissement d’un ennemi. Tu t’es constitué le mortel adversaire de ce peuple, et parmi ce peuple sont des gens qu’on n’a jamais pu insulter ni défier impunément. Ne prends pas le soin de me faire chercher ; ce serait peine inutile : je te rencontrerai un autre jour qui viendra au gré de mon désir, et non au tien. Ne pousse pas tes perquisitions jusqu’à la cruauté pour découvrir comment je t’ai trompé, car il est impossible que tu le saches jamais. Après cet avis tout amical, regarde-moi bien, puis