Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/43

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et l’activité de Porteous le rendaient, sous un rapport, très-propre à commander une garde destinée à étouffer les agitations populaires, sous un autre il semblait peu propre à remplir une fonction aussi délicate, à cause de son caractère acerbe et impétueux, toujours prêt à en venir aux coups et à la violence ; il était aussi trop disposé à regarder la populace (qui manquait rarement de l’accueillir, lui et les siens, avec quelques marques de haine) comme une troupe d’ennemis déclarés sur lesquels il était naturel et juste qu’il cherchât à se venger. Toutefois, comme il était le plus actif et le plus dévoué des capitaines de la garde de la ville, ce fut à lui que les magistrats confièrent le commandement des soldats désignés pour maintenir l’ordre pendant l’exécution de Wilson. On lui donna donc la mission de garder le gibet et l’échafaud avec toute la force disponible, c’est-à-dire avec environ quatre-vingts hommes.

Mais les magistrats prirent encore d’autres précautions qui blessèrent vivement l’amour-propre de Porteous : ils requirent l’assistance d’un bataillon d’infanterie régulière, non pour surveiller l’exécution, mais pour occuper la principale rue de la ville, afin d’intimider la populace, si elle voulait commettre quelque désordre, en déployant une force qui ne permettrait aucune résistance. Il peut nous paraître ridicule, à nous qui voyons cette ancienne garde urbaine tout-à-fait détruite, que son commandant se montrât aussi jaloux de l’honneur de ce corps ; cependant il en fut ainsi. Le capitaine Porteous se trouva très-humilié qu’on fît entrer dans la ville des fusiliers gallois, pour les placer dans une rue où nul autre tambour que les siens n’avait droit de battre sans l’ordre exprès ou la permission des magistrats. Comme il ne pouvait faire tomber sa mauvaise humeur sur ceux-ci, sa colère s’en accrut, ainsi que son désir de se venger du malheureux Wilson et de ses partisans. Ces mouvements intérieurs de jalousie et de rage opérèrent dans ses traits et tout son extérieur un changement manifeste pour tous ceux qui le virent dans la fatale matinée du jour de l’exécution. L’extérieur de Porteous prévenait en sa faveur ; il était de moyenne taille, vigoureux, bien fait ; il avait la tournure militaire, et cependant l’air assez agréable ; il était brun, légèrement marqué de petite vérole ; son œil était plutôt doux que méchant et farouche. Mais ce jour-là on l’eut cru agité par quelque mauvais génie. Sa démarche était irrégulière, sa voix sombre et saccadée, sa figure pâle, ses yeux étincelants