Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/465

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économie rurale, il avait été un peu embarrassé sur le choix de la personne à qui il en confierait la direction. La conversation que Sa Grâce avait eue avec Jeanie à ce sujet, pendant leur retour de Richmond, lui avait inspiré la confiance que son père, dont elle citait fréquemment l’expérience et les heureux succès, était précisément l’homme qu’il lui fallait. Comme il était probable que la condition attachée à la grâce d’Effie engagerait Davie Deans à changer de résidence, cette idée se représenta plus fortement à l’esprit du duc ; et comme il portait l’enthousiasme aussi loin en agriculture qu’en bienfaisance, il crut agir également dans l’intérêt de ces deux causes en écrivant à Édimbourg à la personne chargée de ses affaires, pour prendre des informations sur le compte de Davie Deans, nourrisseur de bestiaux à Saint-Léonard, lui mandant que si, d’après ces renseignements, il le jugeait capable de remplir ses vues, il lui offrît des conditions avantageuses pour se charger de la direction de sa ferme du comté de Dumbarton.

Cette proposition fut faite au vieux Davie deux jours après que la grâce de sa fille fut arrivée à Édimbourg. Il avait déjà formé la résolution de quitter Saint-Léonard. L’honneur d’être appelé par le duc d’Argyle lui-même à la direction d’un établissement qui demandait tant d’activité et d’expérience était en lui-même très-flatteur, et d’autant plus que l’honnête Davie, qui n’avait pas une mince opinion de ses propres talents, se figurait qu’en acceptant cet emploi il trouverait en quelque sorte un moyen de s’acquitter du bienfait qu’il avait reçu de la famille d’Argyle. Les appointements qu’on lui offrait, outre lesquels on lui accordait encore le droit de pâturage pour son propre bétail, étaient fort avantageux, et l’œil pénétrant de Davie découvrit bientôt combien la contrée était favorable pour faire avec profit le commerce des bestiaux avec les montagnes. Ce voisinage pouvait bien lui faire courir quelque risque de pillage, mais le redoutable nom du duc était déjà une garantie, et en payant une bagatelle pour la contribution noire, Davie était certain d’assurer sa tranquillité.

Cependant deux considérations le faisaient hésiter encore : la première, c’était le caractère du ministre de la paroisse dans laquelle il allait habiter ; mais ses scrupules à ce sujet furent entièrement levés, comme nous l’expliquerons bientôt au lecteur. Le second obstacle était la condition imposée à sa jeune fille de quitter l’Écosse pendant un si grand nombre d’années.

Cette crainte fit sourire l’agent du duc, et il répondit qu’il ne