Page:Œuvres de Walter Scott, Ménard, traduction Montémont, tome 26, 1838.djvu/568

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hier soir, et j’ai fait avertir une dizaine de bons garçons auxquels j’ai fait prendre leurs jupons, et je suis parti avant le lever du soleil. — Je suis étonnée que vous leur ayez fait prendre ce costume, capitaine, dit mistress Butler, vous savez qu’il y a un acte du parlement qui défend de le porter. — Bon, bon ! ne vous inquiétez pas de cela, mistress Butler ; la loi n’a encore que trois ans, elle est un peu jeune pour être arrivée jusqu’à nous, et d’ailleurs comment diable auraient-ils fait pour gravir les rochers avec ces maudites culottes ? J’ai mal au cœur, rien que de les voir. Mais, quoi qu’il en soit, je crois bien connaître le gîte où se cache Donacha, et certes j’ai été à l’endroit où il a passé la dernière nuit, car j’ai vu les feuilles sur lesquelles les drôles avaient couché et les cendres de leur feu, à telle enseigne qu’il y avait encore un tison allumé ; mais il faut qu’ils aient eu avis par quelqu’un de l’île de ce qui se passait, car j’ai eu beau chercher dans tous les trous et toutes les tanières, comme si j’avais été à la poursuite d’un daim, du diable si j’ai pu apercevoir le pan de son habit ; malédiction ! — Il aura sans doute traversé le détroit pour aller à Lowal, » dit Davie ; et Reuben, qui était sorti ce matin-là de bonne heure pour abattre des noix, ajouta « qu’il avait vu une barque qui se dirigeait vers la baie de Hords-Cove, » endroit bien connu des enfants, quoique leur père, plus sédentaire, n’en soupçonnât pas même l’existence. — De par Dieu ! dit Duncan, je ne resterai ici que le temps nécessaire pour boire ce verre d’eau-de-vie et d’eau, car à est fort possible qu’il soit dans les bois. Donacha n’est pas un sot, et peut-être pense-t-il qu’il vaut mieux rester au coin de la cheminée que de s’en éloigner quand elle fume. Il ne s’est pas imaginé que personne le chercherait si près. Je prie milady d’excuser mon brusque départ : je reviendrai incessamment et je vous ramènerai Donacha mort ou vif, ce qui, je suppose, vous plaira également. J’espère bien passer une soirée agréable avec votre Seigneurie, et prendre ma revanche au tric-trac avec M. Butler : je rattraperai les quatre sous qu’il m’a gagnés. Je pense qu’il sera sans doute bientôt de retour, autrement il sera mouillé, car la pluie s’apprête à tomber avec abondance. »

En parlant ainsi, après bien des saluts et des excuses de quitter sitôt ces dames, excuses qu’elles agréèrent très-volontiers, et après des assurances réitérées d’un prompt retour, assurances de la sincérité desquelles mistress Butler ne faisait pas le moindre