Page:Œuvres de la citoyenne de Gouges.djvu/14

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vois aujourd’hui ! Je t’ai vu alternativement flatter la cour et le peuple ; je te vis abandonner ton respectable exil pour courir au milieu d’une cour dépravée, qui te donnoit l’espérance d’un mariage qui flattoit ton ambition ; je te vis rempli de ces espérances, voler en Angleterre et abandonner la cause du peuple. Et enfin, ton ambition détrompée laissa à ta vengeance une libre carrière. Je ne puis y réfléchir sans en frémir d’horreur ; que de forfaits l’histoire amasse sur ta vie ! Et ce qui paroîtra plus étonnant, c’est que ton parti même affecte de te mépriser en te servant. C’est sous le masque spécieux du républicanisme que ces odieux Cromvelistes jettent la terreur et parlent d’assassiner tous ceux qui ont voté pour l’exil de Louis Capet. Cependant depuis quelques temps, j’étois revenue sur ton compte ; j’ai même fait l’éloge de ton fils dans l’Entrée de Dumouriez à Bruxelles ; et d’après cet éloge, tu dois sentir combien je suis impartiale à ton égard.

Lorsque je t’ai vu, en votant la mort de Louis XVI, faire le serment d’immoler de ta main celui qui voudroit nous assujétir de nouveau, et de mourir en défendant le gouvernement républicain, j’ai cru, quelle que fût l’horreur que ton vote eût produit dans mon âme, que je m’étois trompée sur ton compte. Je