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Page:Œuvres de la citoyenne de Gouges.djvu/15

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crois que j’aurois pris ta défense, lorsque par une de ses rencontres bizarres, je me trouve aller loger dans la même maison d’un homme qui a été dix ans ton lecteur. Dans plusieurs conversations que j’ai eue avec lui, il a été question de toi. Suivant lui, tu dois monter sur le trône, ou arriver à la dictature. Me trouvant moins indisposée contre toi, il a essayé de me mettre dans tes intérêts. Il m’a assuré même que lorsque tu serois tout-puissant, je te verrois d’un autre œil. Cette injure grossière m’a révoltée, je te l’avoue : mais j’ai voulu l’entendre jusqu’à la fin. J’ai voulu connoître les moyens qui pouvoient te conduire au rang suprême de roi ou de dictateur ou de régent, et comment il te seroit possible de changer les esprits et les opinions. Que vous êtes simple, m’a dit cet homme ! Les grands meneurs de ce projet n’ont aucun doute sur la réussite, et celui qui est à la tête a une expérience profonde des révolutions. Il sait comme on conduit les hommes, et depuis quatre ans il m’a instruit d’avance de tout ce qui s’est passé. Cet homme m’a tenu cette conversation avant la disette du pain, et ce qu’il appelle la promenade civique qui s’est faite chez les épiciers, est arrivée au moment précis où il me l’avoit annoncée. Il m’avoit prédit aussi le massacre