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Page:Œuvres de monsieur Nivelle de La Chaussée, 1762, tome 3.djvu/89

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Le Président.

Mais le défunt avoit une femme, une fille ;
Il doit être resté quelqu’un de leur famille.

La Baronne.

J’ai bien quelques soupçons ; mais ils sont si légers,
Ils sont si dépourvus…

Le Président.

Ils sont si dépourvus…Qu’importe ? Ils me sont chers ;
Ne les négligez pas, redoublez votre zele ;
Vous n’aurez jamais eu d’occasion plus belle
D’obliger un parent que vous-même avez mis
Depuis long-tems au rang de vos plus vrais amis.

La Baronne.

Croyez que c’est à quoi mon zele s’intéresse.

Le Président.

Je vois d’un pas rapide arriver la vieillesse ;
J’aurai bientôt fini le cours qui m’est prescrit :
Que je serois content & de cœur & d’esprit,
Si je pouvois, avant le terme qui s’approche,
N’être plus accablé d’un si cruel reproche !
Ce seroit mon plus cher et mon plus grand bonheur.
En tout cas, j’ai mon fils ; il est homme d’honneur,
Et capable, entre nous, j’ai tout lieu de le croire,
De faire une action qui le couvrant de gloire,
Éternise après moi le sang dont il est né,
Et me donne en mourant un repos fortuné.
Oui, j’en jouis d’avance, et mon âme est tranquille.
Il pourroit cependant arriver que Sainville,
Répandu, dissipé comme il l’est à présent,
Eût altéré ses mœurs.