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Page:Œuvres de monsieur Nivelle de La Chaussée, 1762, tome 3.djvu/90

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La Baronne.

Eût altéré ses mœurs.L’exemple est séduisant ;
Mais…

Le Président.

Mais…D’un autre côté, c’est sur quoi je me fonde,
Sainville a grand besoin de l’école du monde.
Philosophe un peu jeune, & même trop ardent,
Il s’abandonne trop à son zele imprudent :
Ami de la franchise, il croit que la souplesse
Est indigne d’un homme, & taxe de bassesse
Ces égards mutuels dont la nécessité
A forgé les liens de la société.
Que sert une sagesse âpre & contrariante ?
Heureuse la vertu douce, aimable et liante,
Dont les ris et les jeux accompagnent les pas ;
La raison même a tort, quand elle ne plaît pas.

La Baronne.

La sienne se ressent des défauts de son âge,
Le tems adoucira ce qu’elle a de sauvage.
Espérez.

Le Président.

Espérez.Que je crains qu’il n’ait été trop loin !
Tel est des jeunes gens le malheureux besoin,
Qu’il faut, pour les polir, risquer de les corrompre ;
Avec lui-même enfin je l’ai forcé de rompre,
D’aller, de se répandre, & de se faire voir ;
Mais son obéissance a passé mon espoir :
Vous ne le voyez plus, moi-même il me néglige.

La Baronne.

Croyez que l’Amour seul aura fait ce prodige.