Page:Œuvres mêlées 1865 III.djvu/173

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mérite de mes sentiments obtenoit de vous un regret que je sois vieux, et un souhait que je fusse jeune, je serois content. La grâce d’un souhait est peu de chose, ne me la refusez pas. Il est naturel de souhaiter que tout ce qui nous aime soit aimable.

Il ne fut jamais de passion si désintéressée que la mienne. J’aime les personnes que vous aimez, et je n’aime pas moins ceux qui vous aiment. Je regarde vos amants comme vos sujets, au lieu de les haïr comme mes rivaux : ce qui est à vous m’est plus cher, que ce qui est contre moi ne m’est odieux. Pour ce qui regarde les personnes qui vous sont chères, je n’y prends guère moins d’intérêt que vous : mon âme porte ses affections et ses mouvements où vont les vôtres. Je m’attendris de votre tendresse, je languis de vos langueurs. Les chants les plus passionnés des opéras ne me touchent plus d’eux-mêmes ; ils ne font d’impression sur moi que par celle qu’ils ont faite sur vous. Je suis touché de vous voir touchée ; et ces soupirs douloureux qui vous échappent, coûtent moins à votre cœur qu’ils ne coûtent au mien.

J’ai peu de part à faire vos peines, et j’en ai autant que vous à les souffrir. Quelquefois vous produisez en nous une passion différente de celle que vous avez voulu exciter. Si vous récitez les vers d’Andromaque, vous donnez