Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/176

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contre Descartes, d’autant plus vivement que Descartes n’est pas un homme d’Église, mais un gentilhomme comme lui, élevé aussi par les jésuites, également insurgé contre eux et la scolastique, et fondateur d’une philosophie toute laïque, qui n’étoit ni moliniste ni janséniste, mais humaine, en quelque façon. Le point de raison du maréchal d’Hocquincourt étoit le mot d’ordre des théologiens, en 1650 ; et l’on voit par les écrits du temps que ce mot étoit la formule favorite des jésuites. Descartes proclamoit au contraire la souveraineté de la raison, et s’il s’inclinoit devant le catholicisme, c’étoit en tant que vérité, et non en tant qu’autorité. Descartes rétablissoit donc la raison dans le domaine philosophique, en même temps que Louis XIV rétablissoit l’ordre dans le domaine politique. Cet équilibre salutaire a duré pendant un quart de siècle. C’est Mme de Maintenon et les jésuites qui ont tout gâté. La bienséance de bon goût qui jusqu’alors avoit été la loi de la bonne compagnie, s’est changée en une hypocrisie haïssable ; et dès ce moment s’est apprêtée une reprise de faveur du scepticisme. Dès 1688, la princesse Palatine écrivoit : « La cour devient maintenant si ennuyeuse avec ses continuelles hypocrisies, qu’on n’y peut plus tenir. » Et dix ans plus tard : « On ne voit presque plus maintenant un seul jeune homme qui ne veuille être athée ; mais ce qu’il y a de plus drôle, c’est que le même individu qui fait l’athée, à Paris, joue le dévot, à la cour. »

La société polie s’étoit, en effet, partagée comme en deux courants d’opinions et d’habitudes : celui de Versailles, où dominoit l’esprit de Mme de Mainte-