le plus, en apparence, dans la réputation de Saint-Évremond ; mais au fond, ce qu’il veut frapper, c’est le philosophe calme, bienséant, réservé, dont tous les écrits contrastoient avec les emportements sans limite du nouveau chef de la philosophie.
Voltaire qualifie justement l’abbé de Chaulieu, en l’appelant le premier des poëtes négligés. Mais cependant, en lui donnant le pas sur Saint-Évremond, dans le Temple du goût, Voltaire manque d’équité. Quelle pièce de vers a survécu à cet abbé si souvent en goguette, et si voisin de Grécourt : aimable et spirituel, sans doute, mais d’un goût si souvent hasardé ! Quel ouvrage de Chaulieu peut entrer en parallèle avec cette épître charmante de Saint-Évremond, dont tout esprit orné connoît les rimes agréables :
J’ai vu le temps de la bonne régence, etc.
Voltaire lui-même a-t-il rien de plus fin que ces vers à l’Homme sur le retour :
Qu’il te faut d’art avec des belles
Que tu veux tendres et cruelles !
Que d’art à vaincre les rigueurs !
Que d’art à borner les faveurs !
Saint-Évremond, négligé comme Chaulieu, demeure le maître de ce dernier, qui du reste lui fait hommage, en toute occasion. C’est pourtant dans cette partie des œuvres complètes de notre auteur que nous avons le plus sacrifié au choix. En général ces bluettes auxquelles Saint-Évremond n’attachoit aucune importance, n’avoient pas été composées pour la publicité. Elles n’avoient qu’une valeur de salon, qui est perdue pour nous.