Page:Œuvres mêlées 1865 Tome I.djvu/547

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connoissance précède l’attachement aux objets. Aux surnaturels, l’âme s’y prend, s’y affectionne, s’y attache, s’y unit, sans que nous les puissions comprendre.

Dieu a mieux préparé nos cœurs à l’impression de sa grâce, que nos entendements à celle de sa lumière. Son immensité confond notre petite intelligence : sa bonté a plus de rapport à notre amour. Il y a je ne sais quoi, au fond de notre âme, qui se meut secrètement, pour un Dieu que nous ne pouvons connoître ; et de là vient que, pour travailler à la conversion des hommes, il nous faut établir, avec eux, la douceur de quelque commerce, où nous puissions leur inspirer nos mouvements : car, dans une dispute de religion, l’esprit s’efforce en vain de faire voir ce qu’il ne voit pas : mais, dans une habitude douce et pieuse, il est aisé à l’âme de faire sentir ce qu’elle sent.

À bien considérer la religion chrétienne, on diroit que Dieu a voulu la dérober aux lumières de notre esprit, pour la tourner sur les mouvements de notre cœur. Aimer Dieu et son prochain, la comprend toute, selon saint Paul. Et qu’est-ce autre chose, que nous demander la disposition de notre cœur, tant à l’égard de Dieu, qu’à celui des hommes ? C’est nous obliger, proprement, à vouloir faire par les tendresses de l’amour, ce que la politique nous ordonne,