Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/116

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l’empire, ou rendre au peuple sa première liberté. Les exemples de Sylla et de César, quoique différents, faisoient une impression égale en faveur de ce dernier sentiment. Il considéroit que Sylla, qui avoit quitté volontairement la dictature, avoit eu une mort paisible au milieu de ses ennemis ; et que César, pour l’avoir gardée, avoit été assassiné par ses meilleurs amis qui en faisoient gloire.

Je sais que ces matières-ci ne souffrent guère les vers ; mais on peut alléguer ceux de Corneille, sur les Romains, puisqu’il les fait mieux parler qu’ils ne parlent eux-mêmes.

Sylla m’a précédé dans ce pouvoir suprême,
Le grand César mon père en a joui de même ;
D’un œil si différent tous deux l’ont regardé,
Que l’un s’en est démis, et l’autre l’a gardé.
Mais l’un cruel, barbare, est mort aimé, tranquille,
Comme un bon citoyen dans le sein de sa ville :
L’autre, tout débonnaire, au milieu du Sénat
A vu trancher ses jours, par un assassinat2.

Combattu d’une incertitude si fâcheuse, il découvrit l’agitation de son âme à ses deux amis principaux, Agrippa et Mécénas. Agrippa, qui lui avoit acquis l’empire par sa valeur, lui conseilla, par modération, de le quitter ; si ce n’est peut-être qu’il ait eu des fins plus cachées, et que, pour se trouver plus grand homme de


2. Cinna, acte II, sc. i.