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Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/251

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nom seul de Monsieur de Beaufort, les peuples se sont trouvés émus, sans le connoître ; et, par je ne sais quelle impulsion, tous les cœurs se sont portés à cette furieuse amitié. Il est certain qu’il est devenu leur pôle, sans les avoir servis, sans les avoir pratiqués, sans avoir rien fait qui pût attirer ni leur gratitude, ni leur amitié, ni leur estime. De cette sorte, ils ont fait pour lui ce qu’ils ne se pouvoient empêcher de faire ; et, à parler sainement, il est beaucoup plus obligé au bonheur de sa naissance qu’à leurs bonnes volontés. Cependant, il avoue qu’il leur doit toutes choses, et ne prétend point, par une méconnoissance si exquise, payer de véritables obligations. Il ne proteste pas-seulement qu’il sera toujours dans le dessein de servir des peuples qui l’ont servi ; il assure qu’il aura pour eux, toute sa vie, des sentiments d’amitié particuliers, une parfaite ressemblance d’humeurs, un secret rapport de pensées, une conformité admirable de langage et de manières, qui doivent maintenir entre eux une liaison éternelle.

Et toutefois, Messieurs de Paris veulent rompre injurieusement ; d’une passion qui alloit jusqu’à la folie, on les voit passer à une haine qui va jusqu’à la fureur ; ce ne sont que reproches d’inconstance et de perfidie. Et du moment qu’ils l’ont vu moins misérable, ils l’ont traité comme un ingrat, et un corrompu. Souffrez, Messieurs, que je vous parle sans passion. Si j’ai dit quelque chose en sa faveur, ne croyez pas que je sois gagné, ni prévenu, ni que je veuille m’attirer une animosité générale, pour conserver les bonnes grâces d’un particulier. Je fais ici profession d’une sincérité tout entière, et Dieu