Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/341

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vous n’attendez que du sentiment. Virgile touche d’une impression toute juste, où il n’y a rien de languissant, rien de trop poussé. Comme il ne vous laisse rien à désirer, il n’a aussi rien qui vous blesse ; et c’est là que votre âme se rend avec plaisir à une proportion si aimable.

Je m’étonne que dans un temps où l’on tourne toutes les pièces de théâtre sur l’amour, on en ignore assez et la nature et les mouvements. Quoique l’amour agisse diversement selon la diversité des complexions, on peut rapporter à trois mouvements principaux tout ce que nous fait sentir une passion si générale : aimer, brûler, languir.

Aimer simplement, est le premier état de notre âme, lorsqu’elle s’émeut par l’impression de quelque objet agréable ; là il se forme un sentiment secret de complaisance en celui qui aime, et cette complaisance devient ensuite un attachement à la personne qui est aimée. Brûler, est un état violent, sujet aux inquiétudes, aux peines, aux tourments : quelquefois aux troubles, aux transports, au désespoir, en un mot, à tout ce qui nous inquiète ou qui nous agite. Languir, est le plus beau des mouvements de l’amour ; c’est l’effet délicat d’une flamme pure qui nous consume doucement ; c’est une maladie chère et tendre qui nous fait