Aller au contenu

Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/37

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

fortes raisons ; et il comptoit toujours avec les villes que nous laissoient les Espagnols, celles qui rentreroient au pouvoir du roi. Mais, à parler sainement, les grandes contributions irritoient son avidité ; et, comme il ne lui étoit pas possible de les partager avec les gouverneurs, il se faisoit un plaisir de leur voir perdre ce qu’il ne pouvoit pas avoir.

Il y a apparence que la dernière campagne de M. de Turenne lui a donné quelque secrète jalousie13 ; particulièrement ces heureux succès, où sa vanité ne pouvoit s’intéresser, comme elle avoit fait ridiculement à la bataille de Dunkerque. Un si grand bonheur lui donna, sans doute, la pensée de négocier : l’ayant toujours eue, dans les événements favorables, pour faire connoître aux généraux l’incertitude de leur condition, et les tenir, au milieu de tous leurs progrès, dans la même dépendance.

Il craignoit de plus, qu’incommodé de goutte, de gravelle, et par conséquent moins


13. M. de Turenne, naturellement fier, ambitieux, étoit redoutable aux ministres, quand il avoit de bons succès. Ils craignoient qu’il ne se voulût rendre maître des affaires. Le cardinal Mazarin ne voulut pas le faire trop puissant. MM. Le Tellier et Colbert le craignirent aussi, après les conquêtes de Louis XIV, dans les Pays-Bas, en 1667 ; et on croit que cela les porta, autant que la triple alliance, à conclure le traité d’Aix-la-Chapelle, l’année suivante. (Id.)