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Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/375

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traordinaire pour pouvoir s’accommoder à la justesse des règles. Ajoutez qu’une vieille impression de chevalerie errante, commune à toute l’Espagne, tourne les esprits des cavaliers aux aventures bizarres. Les filles, de leur côté, goûtent cet air-là, dès leur enfance, dans les livres de chevalerie, et dans les conversations fabuleuses des femmes qui sont auprès d’elles. Ainsi les deux sexes remplissent leur esprit des mêmes idées ; et la plupart des hommes et des femmes qui aiment, prendroient le scrupule de quelque amoureuse extravagance, pour une froideur indigne de leur passion.

Quoique l’amour n’ait jamais des mesures bien réglées, en quelque pays que ce soit, j’ose dire qu’il n’y a rien de fort extravagant, en France, ni dans la manière dont on le fait, ni dans les événements ordinaires qu’il y produit. Ce qu’on appelle une belle passion, a de la peine même à se sauver du ridicule ; car les honnêtes gens, partagés à divers soins, ne s’y abandonnent pas comme font les Espagnols, dans l’inutilité de Madrid, où rien ne donne du mouvement que le seul amour.

À Paris, l’assiduité de notre cour nous attache ; la fonction d’une charge ou le dessein d’un emploi nous occupe : la fortune l’emportant sur les maîtresses, dans un lieu où l’usage est de préférer ce qu’on se doit à ce qu’on