Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/382

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

de mots ce que j’ai assez étendu, je dirai qu’au lieu d’amants agréables, vous n’avez que des discoureurs d’amour affectés ; au lieu de comiques naturels, des Bouffons incomparables, mais toujours Bouffons ; au lieu de Docteurs ridicules, de pauvres savants insensés. Il n’y a presque pas de personnage qui ne soit outré, à la réserve de celui du Pantalon, dont on fait le moins de cas, et le seul néanmoins qui ne passe pas la vraisemblance.

La tragédie fut le premier plaisir de l’ancienne république ; et les vieux Romains, possédés seulement d’une âpre vertu, n’alloient chercher aux théâtres que des exemples qui pouvoient fortifier leur naturel et entretenir leurs dures et austères habitudes. Quand on joignit la douceur de l’esprit pour la conversation, à la force de l’âme pour les grandes choses, on se plut aussi à la comédie ; et tantôt on cherchoit de fortes idées, tantôt on se divertissoit par les agréables.

Sitôt que Rome vint à se corrompre, les Romains quittèrent la tragédie, et se dégoûtèrent de voir au théâtre une image austère de l’ancienne vertu. Depuis ce temps-là, jusqu’au dernier de la république, la comédie fut le délassement des grands hommes, le divertissement des gens polis, et l’amusement du peuple, ou relâché ou adouci.