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Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/431

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Pour Homère, il est merveilleux tant qu’il est purement humain : juste dans les caractères, naturel dans les passions, admirable à bien connaître, et à bien exprimer, ce qui dépend de notre nature. Quand son esprit vaste s’est étendu sur celle des dieux, il en a parlé si extravagamment, que Platon l’a chassé de sa république, comme un fou.

Sénèque a eu tort de traiter Alexandre d’un téméraire, qui devoit sa grandeur à sa fortune. Plutarque me paroît avoir raison, lorsqu’il attribue ses conquêtes à sa vertu, plus qu’à son bonheur. En effet, considérez Alexandre, à son avènement à la couronne ; vous trouverez qu’il n’a pas eu moins de conduite que de courage, pour s’établir dans les états de son père. Le mépris que l’on faisoit de la jeunesse du prince, porta ses sujets à remuer, et ses voisins à entreprendre : il punit des séditieux et assujettit des inquiets. Toutes choses étant pacifiées, il prit des mesures pour se faire élire général des Grecs contre les Perses ; et ces mesures furent si bien prises, qu’on n’en eût pas attendu de plus justes du politique le plus consommé. Il fut élu, il entreprit cette guerre ; il fit faire mille fautes aux lieutenants de Darius, et à Darius lui-même, sans en faire aucune. Si la grandeur de son courage ne l’avoit fait passer pour téméraire, par les périls où il s’exposoit, sa con-