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Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/467

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J’ai vu des gens considérables passer tantôt pour les ornements de la cour, et tantôt être traités de ridicules ; revenir à l’approbation, retomber dans le mépris, sans qu’il y eût aucun changement ni en leur personne, ni en leur conduite. Un homme se retire chez lui, avec l’approbation de tout le monde, qui se trouve le lendemain un sujet de raillerie, sans savoir ce que peut être devenue l’opinion qu’on avoit de son mérite. La raison en est qu’on juge rarement des hommes par des avantages solides, que fasse connoître le bon sens ; mais par des manières dont l’applaudissement finit aussitôt que la fantaisie qui les a fait naître.

Les ouvrages des auteurs sont sujets à la même inégalité de notre goût. Dans ma jeunesse, on admiroit Théophile, malgré ses irrégularités et ses négligences, qui échappoient au peu de délicatesse des courtisans de ce temps-là. Je l’ai vu décrié depuis par tous les versificateurs, sans aucun égard à sa belle imagination et aux grâces heureuses de son génie. J’ai vu qu’on trouvoit la poésie de Malherbe admirable dans le tour, la justesse et l’expression. Malherbe s’est trouvé négligé, quelque temps après, comme le dernier des poëtes : la fantaisie ayant tourné les François aux énigmes, au burlesque et aux bouts-rimés.

J’ai vu Corneille perdre sa réputation, s’il