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Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/491

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y fait jouer. Vous n’y voyez, sur les visages, ni la crainte de perdre, ni la douleur d’avoir perdu. Le désintéressement va si loin en quelques-uns, qu’on leur reproche de se réjouir de leur perte, et de s’affliger de leur gain.

Le jeu est suivi des meilleurs repas qu’on puisse faire. On y voit tout ce qui vient de France, pour les délicats ; tout ce qui vient des Indes, pour les curieux ; et les mets communs deviennent rares, par le goût exquis qu’on leur donne. Ce n’est pas une abondance qui fait craindre la dissipation : ce n’est point une dépense tirée, qui fait connoître l’avarice ou l’incommodité de ceux qui la font. On n’y aime pas une économie sèche et triste, qui se contente de satisfaire aux besoins, et ne donne rien au plaisir : on aime un bon ordre, qui fait trouver tout ce que l’on souhaite, et qui en fait ménager l’usage, afin qu’il ne puisse jamais manquer. Il n’y a rien de si bien réglé que cette maison ; mais Mme Mazarin répand sur tout, je ne sais quel air aisé, je ne sais quoi de libre et de naturel, qui cache la règle : on diroit que les choses vont d’elles-mêmes, tant l’ordre est secret et difficilement aperçu.

Que Mme Mazarin change de logis, la différence du lieu est insensible : partout où elle est, on ne voit qu’elle ; et pourvu qu’on la trouve, on trouve tout. On ne vient jamais