Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/60

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il est certain que, n’étant plus à la tête de leurs troupes, les Romains reprirent aisément la supériorité qu’ils avoient eue.

Si l’on veut aller jusqu’à la seconde guerre punique, on trouvera que les grands avantages qu’eut Annibal, sur les Romains, venoient de la capacité de l’un, et du peu de suffisance des autres : et, en effet, lorsqu’il vouloit donner de la confiance à ses soldats, il ne leur disoit jamais que les ennemis manquoient de courage ou de fermeté, car ils éprouvoient le contraire assez souvent ; mais il les assuroit qu’ils avoient affaire à des gens peu entendus dans la guerre.

Il est de cette science, comme des arts et de la politesse : elle passe d’une nation à une autre, et règne en divers temps, en différents lieux. Chacun sait qu’elle a été, chez les Grecs, à un haut point. Philippe l’emporta sur eux ; et toutes choses arrivèrent à leur perfection, sous Alexandre, lorsque Alexandre seul se corrompit. Elle demeura encore chez ses successeurs. Annibal la porta chez les Carthaginois ; et, quelque vanité qu’aient eue les Romains, ils l’ont apprise de lui, par l’expérience de leur défaite, par des réflexions sur leurs fautes, et par l’observation de la conduite de leur ennemi.

On en demeurera d’accord aisément, si l’on considère que les Romains n’ont pas commencé de résister à Annibal, quand ils ont été