Page:Œuvres mêlées 1865 Tome II.djvu/74

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recours à la justice publique, à mesure que celle des particuliers se corrompoit.

L’intempérance amena de nouvelles maladies, et les médecins furent établis, pour guérir des maux dont la continence avoit garanti les Romains, auparavant.

L’avarice fit faire de petites guerres ; la foiblesse fit appréhender les grandes. Que si la nécessité obligea d’en entreprendre quelqu’une, on la commença avec chagrin, et on la finit avec joie.

On demandoit aux Carthaginois de l’argent qu’ils ne devoient point, quand ils étoient occupés avec leurs rebelles ; et on eut toutes les précautions du monde pour ne rompre pas avec eux, quand leurs affaires furent un peu raccommodées.

Ainsi, c’étoit tantôt des injures, tantôt des considérations, toujours de la mauvaise volonté ou de la crainte ; et certes, on peut dire que les Romains ne surent ni vivre en amis, ni en ennemis : car ils offensoient les Carthaginois, et les laissoient rétablir, donnant assez de sujet pour une nouvelle guerre, où ils appréhendoient de tomber, sur toutes choses.

Une conduite si incertaine se changea en une vraie nonchalance ; et ils laissèrent périr les Sagontins avec tant de honte, que leurs ambassadeurs en furent indignement traités,