Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 1.djvu/749

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86. Cette cité de Dieu, cette monarchie véritablement universelle, est un monde moral, dans le monde naturel, et ce qu’il y a de plus élevé et de plus divin dans les ouvrages de Dieu, et c’est en lui que consiste véritablement la gloire de Dieu, puisqu’il n’y en aurait point si sa grandeur et sa bonté n’étaient pas connues et admirées par les esprits : c’est aussi par rapport à cette cité divine qu’il a proprement de la bonté, au lieu que sa sagesse et sa puissance se montrent partout.

87. Comme nous avons établi ci-dessus une harmonie parfaite entre deux règnes naturels, l’un des causes efficientes, l’autre des finales, nous devons remarquer ici encore une autre harmonie entre le règne physique de la nature et le règne moral de la grâce, c’est-à-dire entre Dieu considéré comme architecte de la machine de l’univers, et Dieu considéré comme monarque de la cité divine des esprits (§§ 62, 74, 118, 248, 112, 130, 247.)

88. Cette Harmonie fait que les choses conduisent à la grâce par les voies mêmes de la nature, et que ce globe par exemple doit être détruit et réparé par les voies naturelles dans les moments que le demande le gouvernement des esprits pour le châtiment des uns et la récompense des autres (§§ 18 sqq., 110, 244-245, 340.)

89. On peut dire encore, que Dieu comme architecte contente en tout Dieu comme législateur, et qu’ainsi les péchés doivent porter leur peine avec eux par l’ordre de la nature, et en vertu même de la structure mécanique des choses, et que de même les belles actions s’attireront leurs récompenses par des voies machinales par rapport aux corps, quoique cela ne puisse et ne doive pas arriver toujours sur-le-champ.

90. Enfin sous ce gouvernement parfait il n’y aurait point de bonne action sans récompense, point de mauvaise sans châtiment, et tout doit réussir au bien des bons, c’est-à-dire de ceux qui ne sont point des mécontents dans ce grand état, qui se fient à la providence, après avoir fait leur devoir, et qui aiment et imitent, comme il faut, l’auteur de tout bien, se plaisant dans la considération de ses perfections suivant la nature du pur amour véritable, qui fait prendre plaisir à la félicité de ce qu’on aime. C’est ce qui fait travailler les personnes sages et vertueuses à tout ce qui paraît conforme à la volonté divine présomptive, ou antécédente, et se contenter cependant de ce que Dieu fait arriver effectivement par sa volonté secrète, conséquente et décisive, en reconnaissant que, si nous pouvions entendre