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Page:Œuvres philosophiques de Leibniz, Alcan, 1900, tome 2.djvu/373

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348 pages, imprimé à Londres, l’an 1656, in-4o, intitulé : Questions touchant la liberté, la nécessité et le hasard, éclaircies et débatlites entre le docteur Bramhall, évêque de Derry, et Thomas Hobbes, de Malmesbury. Il y a une édition postérieure de l’an 1684, dans un ouvrage intitulé Hobbs’s Tripos, où l’on trouve son livre De la Nature humaine son traité Du Corps politique, et son traité De la Liberté et de la Nécessité ; mais le dernier ne contient point la réplique de l’évêque, ni la duplique de l’auteur. M. Hobbes raisonne sur cette matière avec son esprit et sa subtilité ordinaire mais c’est dommage que, de part et d’autre, on s’arrête à plusieurs petites chicanes, comme il arrive quand on est piqué au jeu. L’évêque parle avec beaucoup de véhémence et en use avec quelque hauteur. M. Hobbes, de son côté, n’est pas d’humeur à l’épargner, et témoigne un peu trop de mépris pour la théologie et pour les termes de l’École, où l’évêque paraît attaché.

2. Il faut avouer qu’il y a quelque chose d’étrange et d’insoutenable dans les sentiments de M. Hobbes. Il veut que les doctrines touchant la Divinité dépendent entièrement de la détermination du souverain, et que Dieu n’est pas plus cause des bonnes que des mauvaises actions des créatures. Il veut que tout ce que Dieu fait est juste, parce qu’il n’y a personne au-dessus de lui qui le puisse punir et contraindre. Cependant il parle quelquefois comme si ce qu’on dit de Dieu n’était que des compliments, c’est-à-dire des expressions propres à l’honorer, et non pas à le connaître. Il témoigne aussi qu’il lui semble que les peines des méchants doivent cesser par leur destruction : c’est à peu près les sentiments des sociniens ; mais il semble que les siens vont bien plus loin. Sa philosophie, qui prétend que les corps seuls sont des substances, ne paraît guère favorable à la providence de Dieu et à l’immortalité de l’âme. Il ne laisse pas de dire sur d’autres matières des choses très raisonnables. Il fait fort bien voir qu’il n’y a rien qui se fasse au hasard, ou plutôt que le hasard ne signifie que l’ignorance des causes qui produisent l’effet, et que pour chaque effet il faut un concours de toutes les conditions suffisantes, antérieures à l’événement, dont il est visible que pas une ne peut manquer, quand l’événement doit suivre, parce que ce sont des conditions ; et que l’événement ne manque pas non plus de suivre quand elles se trouvent toutes ensemble, parce que ce sont des conditions suffisantes. Ce qui revient ce que j’ai dit tant de fois, que tout arrive par des raisons déterminantes, dont la connaissance, si nous