Page:Œuvres poétiques de François de Maynard, 1885, tome 1.djvu/102

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Que j’oppose mon cœur à leur pointe meurtriere,
Glorieux de brusler au feu de leur clarté.

Mais mon heur se ternit par une seule crainte :
Car si je meurs blessé d’une si douce attainte,
Je seray sans Amour, comme sans mouvement.

O Dieux faictes au moins que si je perds la vie,
Je meure posedé d’une amoureuse enuie
Pour la chere beauté qui me va consumant !

XLVII.

Or que de mon Soleil la clarté m’est ravie,
Puis que sans la lumiere, hé ! suis-je pas sans cœur ?
Mais s’il est vray, Amour, qu’on meure de douleur,
Pourquoy ce fier regret ne desrobe ma vie ?

Vit autre plus heureux moissonne le bonheur
Que j’alois esperant de ma belle ennemie,
Et je vis, ouy ô Ciel, car mon ame asseervie
Cede au chaste vouloir de son œil mon vainqueur.

Si j’avois moins d’Amour, j’aurois moins de soufrance.
Mais, las sans offencer les lois de ma confiance,
Je ne puis triompher de ce resentiment.

Toutesfois en ce dueil un doux point me console :
Car si je n’ay d’amour que pour ma belle idole,
Elle plaint mon malheur et son esloignement.