Page:Abensour - Histoire générale du féminisme, 1921.djvu/142

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

en quenouille la religion ». Tentative plus hardie, étant donnée l’époque, que celle des Olympe de Gouge ou des suffragettes !

La manifestation la plus nette de l’idée féministe que nous ayons jusqu’à présent rencontrée revêt donc la forme religieuse. Un siècle plus tard va se lever un nouvel apôtre de l’émancipation, mais qui, bien plus proche de nous, demandera au nom de la raison, et dans le domaine intellectuel et politique, ce que Guillelmine demandait, au nom de la foi, dans le domaine religieux : Christine de Pisan.

Christine de Pisan. — Elle est, elle aussi, une curieuse figure. Fille de Thomas de Pisan, savant italien, très en faveur à la cour de Charles V, et venue toute jeune en France, mariée à un homme qu’elle aime et qui l’aime, elle mène d’abord une existence dorée à la cour du sage roi. Les innombrables talents dont l’ont pourvue la nature et une éducation accomplie (car elle est instruite des lettres sacrées et profanes et tourne le vers agréablement), elle les utilise seulement pour sa satisfaction personnelle et le plaisir d’un petit cercle d’amis, parmi lesquels le roi et les princes. Mais les malheurs s’abattent sur elle. Son père, père prodigue, meurt ruiné, suivi quelques années plus tard par son mari qui la laisse veuve, chargée de famille et sans autres ressources que des créances difficiles à recouvrer. Que va faire Christine lorsque, après des mois de démarches infructueuses, où elle a éprouvé la versatilité de la justice, la vanité du bon droit,